Transports en commun

Transport, n.m. [...] Fig. Mouvement de passion violent qui nous met hors de nous-mêmes. (Nouveau Littré)

Il me semble avoir remarqué, en relevant de temps en temps le nez des Mémoires de Saint-Simon, que les jeunes gens à musculature ostentatoire, à débardeur ajusté et à morgue certaine ont une franche tendance à choisir dans le bus les places situées à l'avant et à contresens. Comme pour pouvoir mieux y être admirés du commun des voyageurs, du gros de la troupe, des ventripotents - bref, de ceux qui voyagent dans le sens de la marche.

Pendant que le voyageur lambda essaie de distinguer Monsieur de Monseigneur et de Monsieur le Duc, le bellâtre porte son téléphone à l'oreille, plie le bras, bande son biceps. Le tout en même temps : le bellâtre est multi-tâche. (Il ne lit pas, néanmoins, car il fait nuit derrière ses lunettes.) À son cou, les carats tintinabullent dans un scintillement doré ; de lui, un parfum douceâtre se répand en vagues épaisses.

Le bellâtre est un son et lumière en odorama, il stimule les sens, toujours à contresens.

Il y a, ce me semble, quelque chose d'un peu méprisable à forcer ainsi le regard. (Et l'espionnage. Et le renifflage.) Pourquoi donc, alors, me sens-je si frustré de mon droit de voyeur lorsqu'un beau jeune homme vient s'asseoir derrière moi ? (Et dans le sens de la marche.)

Commentaires

1. Le jeudi 31 août 2006, 00:22 par Lofox

"bander le biceps" .... c'est la nouvelle nomenclature ? Faut que je vérifie ;)