LYS-OPO-LYS

Sur le tarmac grouillent des insectes caparaçonnés et difformes : des coccinelles à roulettes, des lombrics à essence, des coléoptères ventrus qui cachent sous leurs élytres bagages, nourriture et mauvais café. Comme dans une ruche, on s'agite autour de grosses larves blanchâtres et rondes. On les nourrit, on les nettoie, on les choie. Pataudes, presque grotesques, tirées et poussées par des scarabées trapus, elles avancent lentement sur la piste. On remarque enfin leurs ailes et, gracieuses, elles s'élancent vers le ciel.

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Quoi de plus charmant qu'un steward qui rougit lorsqu'il remarque que vous le regardez faire la danse de la sécurité ?

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C'est une chose que de ne pas avoir peur en avion, c'en est une autre que de supporter stoïquement l'écoute des consignes de sécurité. Une fois enregistrées en français, puis en portugais, puis mimées en anglais. Cette insistance a quelque chose de suspect : pourquoi veulent-ils tant qu'on ne panique pas ? Et pourquoi ne faut-il pas gonfler le gilet de sauvetage tant qu'on est dans l'avion ? Risque-t-on d'étouffer ou de rester coincé dans la porte ? Pourquoi, surtout, devrait-on entendre la consigne brace, brace ? La manière posée dont l'énonce la voix enregistrée semble déjà résignée : pas d'exclamation, une simple constatation. Brace, brace. La position à adopter, inconfortable et introspective, conviendrait à la prière. Brace, brace and pray.

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Lors des phases de décollage et d'atterrissage, les rideaux qui masquent les hublots doivent être relevés. La raison n'est pas donnée à cette exigence dont on voit mal en quoi elle améliore la sécurité. Que les pilotes voient la piste, certes, mais les passagers ? Mon hypothèse : ce n'est que pur sadisme. Il faut que les quelques uns qui ont vue sur les ailes profitent du spectacle : l'aile qui vibre et qui tremble, comme une feuille de papier au vent ; les traces d'usure qu'on n'avait pas remarquées avant, sur le métal, sur les rivets ; cette constatation terrible, quand s'abaissent complètement les volets, que l'aile qu'on espérait solide est en fait creuse, ouverte à tous les courants d'air. Cette obligation de maintenir découverts les hublots, c'est la claque : je jurerais que les premiers à atterrir, après l'atterrissage, sont ceux qui n'ont pas quitté les ailes des yeux.

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Ladies and gentlemen, my name is John Flam, and I am you captain on this flight to Porto.

Personne n'avait rien remarqué, jusqu'à la traduction par le steward.

Mesdames et messieurs, une traduction du message de notre commandant, le Capitaine Flam.

Commentaires

1. Le lundi 24 octobre 2011, 12:54 par Val

Il y avait une escale à Mégara?