Liste de saison

Voici la saison du houx toxique et piquant, des chansons mièvres et des repas trop riches ; les enfants s'appliquent en tirant la langue, ils découpent des catalogues mercantiles, ils collent des photos de jouets guerriers ou de poupées sexistes sur des lettres qu'ils décorent avec des feutres rouge et vert. Bref, la magie de Noël fait rage et pousse les âmes pures à commettre des listes. Le Jovial Barbu devant déjà pressurer ses lutins épuisés, ma fibre sociale détourne de lui mes pensées, tandis que ma fibre mesquine les oriente vers un autre.

Voici donc ma liste au Père Fouettard :

  • Tous les hommes, peu importe leur âge, qui, sur des vêtements civils, portent une écharpe aux couleurs, nécessairement hideuses, d'une équipe de foot. Ô Père terrible, étrangle-les dans ces oripeaux criards, serre jusqu'à ce qu'ils verdissent, abandonne-les où la neige les recouvrera, enfin beaux, comme des sapins enguirlandés de rouge, de bleu et de jaune fluorescent.
  • Toutes les demoiselles, hautaines et anguleuses, au coude desquelles pendouille un sac douloureux, qu'elles projettent dans les côtes des passants qu'elles bousculent en leur reprochant du regard de partager leur trottoir. Ô Père vengeur, arrache-leur ce bras cassé et sers-t'en comme d'une fronde, de ce membre désolé, fais-le tournoyer et propulse se maudit sac sur ces maudites pimbêches.
  • Toutes les mêmes, dont la vanité insulte l'esprit humain en s'acharnant à tenir à bout de bras ce que des ingénieurs se sont ingéniés à faire tenir dans une poche. Ô Père impitoyable, fais-les disparaître, ces monolithes noirs, fais-les-leur bouffer, jusqu'à ce fil blanc qui amène à leurs oreilles comme des fanfares de fourmis.
  • Tous ces messieurs, qui n'existaient pas il y a un mois mais qui semblent avoir remplacé soudain la cohorte aux écouteurs posés sur l'oreille, tous ces messieurs qui exhibent toute une maroquinerie monogrammée, qui montrent ce LV mégalomane comme les péronnelles leur pomme croquée, tous ces hommes-sandwiches auxquels je n'ai rien d'autre à reprocher que cet enthousiasme à être marqué. Ô Père moqueur, exauce leur vœux, mais au fer rouge, à même la peau, et fais que le cheptel cesse de se croire libre.

Oh, oh, oh ! Voilà qui serait un joyeux Noël...