15 mai 2012

Première déception — Sifflets — Coup de foudre franco-allemand

Le bon sens l'a emporté : Jean-Marc Ayrault est Premier ministre. La règle était stupide par sa trop grande rigidité et son manque de nuance : ne nommer aucun ministre qui ait été condamné, l'idée semble bonne, mais un excès de vitesse vaut-il une affaire de corruption ? Quid de la réhabilitation ou de la prescription ? L'affaire, en l'occurrence, était ambiguë : il s'agissait certes d'un non-respect du code des marchés publics, cela même que la nouvelle majorité reprochait à l'ancien Président à propos des sondages commandés ; pour autant, sitôt l'irrégularité signalée par la Cour des comptes, Jean-Marc Ayrault avait mis fin à la situation litigieuse. Et tout ceci, si lointain, quasi oublié, en tout cas réhabilité. Cette affaire, il me semble, n'empêche pas Jean-Marc Ayrault de devenir Premier ministre.

Pourquoi, alors, me semble-t-il qu'elle aurait dû empêcher François Hollande de le nommer ? Car j'aurais aimé, pour une fois, qu'une règle énoncée soit respectée, aussi stupide et inopportune soit-elle. Redonner un sens aux mots et une valeur à la parole politique, après ce quinquennat et cette campagne qui n'ont fréquenté qu'épisodiquement la vérité, voilà qui serait un bon premier pas pour une présidence normale et irréprochable. Le bon sens l'a emporté, disais-je : Jean-Marc Ayrault sera sans doute un bon Premier ministre. Mais cette victoire du bon sens risque d'entacher toutes les suivantes : après cette infraction d'une règle choisie, tout choix d'un réalisme souhaitable plutôt que d'un idéalisme inatteignable pourra passer au mieux pour une renonciation, au pire pour un nouvel accommodement.

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Au soir de sa défaite, Nicolas Sarkozy donna un discours trop personnel et trop satisfait à mon goût, mais pendant lequel il eut l'élégance de faire taire ses supporteurs qui huaient le nouveau Président. Il ne me semble pas que François Hollande en ait fait autant un peu plus tard à Tulle. Que l'on siffle un candidat, c'est regrettable mais, après tout, c'est une expression politique, sommaire, inarticulée, mais acceptable. Qu'un soir d'élection, en revanche, on siffle le Président issu du scrutin universel, voilà qui me choque.

Qu'à l'inélégance on ajoute le ridicule et c'est la politique qu'on déshonore : quelle bassesse que cet attroupement médiocre réuni devant l'Élysée pour siffler les ministres nouvellement nommés.

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Anecdote, micro-événement, rigolade obligée : la foudre a frappé l'avion qui menait François Hollande vers Angela Merkel. Les enjeux de cette rencontre ? son contenu ? son résultat ? Oubliés ou ignorés. On ne retiendra que l'accessoire. Réflexe facile : blâmer les journalistes. Mais serait-ce juste ? L'opinion s'intéresse-t-elle encore à autre chose que ces instantanés ?