Brèves d'une mission en Chine - 1

Samedi 4 août, départ

Les petits matins de départ, je suis vide. Je ne parviens pas à m'exciter, à m'imaginer ce qui peut m'attendre, à me projeter dans quoi que ce soit. Ni à délaisser le quotidien. Les dehors de la ville sont plus endormis que moi ; je vagabonde par la pensée dans les rues des bords de la voie de tram tandis que les maisons bariolées passent muettes, comme les jetons d'un Monopoly grandeur nature. J'attends Meyzieu à partir d'où, pour cinq minutes finales, le tram aura définitivement rompu avec la ville pour ne plus viser que le clocher du petit village de Satolas, toujours aussi radieux dans le soleil levant.

Terminal 2E portes L, Roissy - Charles de Gaulle

Deux jeunes enfants sont assis devant un piano droit apparemment à disposition des passagers en attente. Ils jouent une bluette enfantine à quatre mains, encore et encore, en accrochant. Au bout de quelques minutes que je les regarde, une dame se lève. Je crois comprendre qu'elle leur signifie que l'étude est terminée, qu'ils peuvent aller jouer. Elle rêvasse un instant, à regarder les avions. Elle attend on ne sait quoi devant les grandes baies vitrées, la main à plat sur le piano. Elle se décide et prend le siège face à l'instrument pour se mettre à jouer une petite pièce, probablement une des Romances sans paroles de Mendelssohn. Parfaite adéquation au calme des lieux.

Dimanche 5 août

Le petit village le plus proche de la base vie, Qintou, est très, très sale. Les rues sont puantes, les détritus sont partout sur les bas-côtés. Beaucoup de Chinois marchent pieds nus.

Lundi 6 août

La chaleur est pesante ; il pleut, le taux d'humidité dans l'air dépasse les 90%. Je mets un pied hors de la chambre, j'attends quelques secondes : j'ai le visage ruisselant. On m'avait prévenu, mais c'est assez surprenant. J'allais découvrir plus tard qu'aller sur le chantier habillé de pied en cap avec tenue, casque, gants, lunettes, devait confiner au sauna.