Un aller-retour

Que retenir de ces quelque 33 heures passées en Chine, à part un bilan carbone désastreux ? Les à-côtés, assurément.

Avant que le départ se confirme, je ne savais pas que j’aurais droit à une place en classe affaires. Ce fut une excellente nouvelle, et une première expérience que je renouvellerai avec plaisir si on me la proposait à nouveau. Alors : champagne avant décollage, à l’apéritif ; bons vins avec le repas (Pouilly-Fuissé de chez Louis Jadot, quel bouquet de fleurs fraîches), digestif. Des plats très honnêtes, et un personnel de bord aux petits soins. Dommage que le prix du billet soit inabordable avec des moyens personnels.

Sur place : deux bons repas également. Le soir de l’arrivée, un hot pot chinois : vous faites cuire la nourriture de toute la tablée dans un bouillon chauffé par du charbon, au centre de la table. Légumes, viandes sont ensuite trempées dans un bol individuel de sauce que l’on agrémente de piments, d’oignons, d’herbes. Le tout arrosé d’alcool de sorgho à 53° (il en existe aussi d’autres marques titrant jusqu’à 70°, nous ont dit nos convives, mais nous n’avons pas essayé). Certains chinois peuvent en boire en quantité déraisonnable comme si c’était de l’eau.

Le lendemain matin, réunion.

Le midi, resto chic de l’hôtel. Tous les plats usuellement servis à table en Chine ont dû se retrouver sur la table tournante à un moment ou l’autre du repas (il y avait un esturgeon entier à se damner), mais plus fins que je ne les avais jamais mangés. Donc, un régal. Ah tiens, l’alcool de sorgho titre à 56° ce midi. Pour autant, j’ai fait le repas à la Tsing Tao (la bière la plus consommée) et suis ainsi parvenu à éviter le déshonneur.

L’après-midi, direction la Cité Interdite. Visite glaciale : -5°C dehors, et de grands vents. Les cinq minutes de la traversée de la place Tian’an men furent bien trop longues, et une fois entrés dans la Cité, nous traversions les cours successives au pas de course avec mon collègue. C’est gigantesque, il faudrait revenir, mais déjà nous avons du y rester trois heures, ce qui n’est pas si mal. Une petite déception : indépendamment du froid, quasiment aucun bâtiment ne se visite, ils restent pour l’immense majorité fermés avec des vitres en plexiglas à travers lesquelles on devine les intérieurs.

Ah oui, les taxis, évidemment. Pour aller à la Cité Interdite, nous en avons pris un. Nous nous étions dit que ça ne valait pas le coup de marcher longtemps (voire très longtemps) jusqu’à la station de métro la plus proche vu qu’à trajet égal, un taxi en Chine doit être 5 à 10 fois moins cher qu’un taxi en France. A l’aller, l’hôtel nous appelle donc un taxi : 31 yuans le trajet d’une demi-heure (4 euros) embouteillages inclus, et déjà je comprenais ce qui allait m’attendre pour le retour et qui ne manqua pas d’arriver. J’avais joué demi fin en prenant une carte de l’hôtel, où son nom figure évidemment en Chinois. Demi fin, car j’aurais pu retenir le nom de la station de métro la plus proche de l’hôtel…  Donc, au retour, premier taxi. Heureusement, on est à Pékin, les taxis baragouinent quelques mots d’anglais. Il demande 200 yuans (sans mettre le taximètre, évidemment). J’argumente, je me démène, je m’énerve. Je le laisse partir. Le deuxième : plus sournois encore que le premier, il fait mine de se creuser la tête, d’avoir l’air de réfléchir au chemin pour aller jusqu’à destination. 140 yuans. Je me calme, je lui dit qu’il mette le taximètre et qu’on verrait la somme finale, il me dit qu’il est cassé, etc. Je menace d’appeler le numéro qui figure sur la plaque bleue et de me plaindre de cet arnaqueur au service compétent. Il éclate de rire que déjà je m’éloigne, pour trouver un troisième taxi de l’autre côté de la rue. Même jeu du conducteur. Même jeu de mon côté. Rien à faire, il me demande 150 yuans. Go to hell!, et la voiture s’éloigne. Mon collègue me regardait faire. Quatrième voiture : ça faisait déjà 20 minutes qu’on attendait dans le froid… 140 yuans. Il y avait apparemment comme un consensus sur cette somme. Je demande 20 yuans, j’explique plein de mauvaise foi et de cynisme que c’est juste à côté, que j’ai payé 15 yuans à l’aller, que c’est intolérable l’image qu’il donne des taxis de son pays aux touristes étrangers, qu’ils prennent tous le métro à cause de la malhonnêteté des taxis. Lui : 130. Moi : 30, mais c’est un prix exagéré. Lui : 130. Je laissais de plus en plus de blancs dans la conversation, et lui restait garé là pour autant. Moi : 30, respectez la loi et mettez votre taximètre, vous verrez que c’est le bon prix (je me contredisais déjà…). Lui : 100, je peux pas faire moins, c’est loin, le trafic, le prix de l’essence, etc. Moi : bon, 40, c’est mon dernier mot. Lui : 100. Mon collègue arrive derrière moi, se penche à la vitre, et braille au conducteur d’une colère froide : écoutez monsieur, vous allez nous conduire à notre hôtel pour 80 yuans. Vous savez que c’est plus que deux fois le prix, nous savons que vous attendez depuis 5 minutes et que vous avez aussi besoin de nous pour vivre. Alors voici vos 80 yuans, et nous partons. Il était monté et je faisais de même. Le taxi démarra.

Le soir : travail glande à l’hôtel, glande à l’aéroport, glande dans le salon avant l’embarquement. Retard de l’avion : décollage vers 2h15 au lieu de 1h40. Repas servi à bord à plus de 3h du matin, je pique du nez dans ma pintade ; même jeu du personnel de bord aussi chouette qu’à l’aller. Transfert à Roissy : j’ai couru littéralement pour avoir le Paris-Lyon, en 55 minutes je vous assure que ce n’est pas évident. Je n’ai pas grugé dans la file d’attente au contrôle de sécurité, qu’il faut repasser.

7h23, je mets le pied dans le second avion, je n’étais même pas le dernier passager, facile. Départ 7h30.