Un papa

Evelyn Waugh était, pour reprendre la terminologie puérile en vigueur ces jours-ci en dépit des règles d’usage et du sens du ridicule — terminologie qui, si l’on y réfléchit bien, n’est sortie de l’ombre des cathédrales et des ors des rallyes que lorsque des enfants d’otage ont demandé un jour au journal télévisé, à la France et au monde qu’on libérât leur maman — bref, comme l’on dit ces jours-ci, Evelyn Waugh était un papa.

Un papa qui, apprenant qu’on risquait de bombarder Londres, prit les devants :

J’ai demandé en conséquence à ce qu’on expédie à Piers Court les livres que je gardais à l’hôtel Hyde Park. Dans le même temps, j’ai plaidé pour que mon fils vienne à Londres. On pourrait croire, sachant cela, que je préfère mes livres à mon fils. Je pourrais arguer que les pompiers sauvent les enfants tandis qu’ils détruisent les livres, mais la vérité est qu’un enfant est facilement remplaçable quand un livre détruit est perdu à jamais ; aussi, qu’un enfant est éternel ; mais, surtout, que j’ai un sentiment de possession absolue de ma bibliothèque, mais pas de ma nursery.

Evelyn Waugh, The Diaries,
Entrée du samedi 13 novembre 1943,
Traduction du blogueur.

Tout le monde n’a certes pas la chance d’avoir pour parent un aristocrate anglais.