Robin des bois

Lorsque j’étais enfant j’aimais Robin des bois. Le dessin animé de Disney, d’abord. Un peu loufoque, avec ce prince Jean débile, il comprend quelques scènes mémorables (dont celles du vol de l’argent pendant le sommeil du prince, je ne sais pas si vous vous en souvenez). Mais je suis vite passé au film de Michael Curtiz de 1938.

Je l’ai infligé à mes parents des dizaines, peut-être des centaines de fois. Musique luxuriante de Korngold (que l’on pourrait qualifier aujourd’hui de très présente), Technicolor scintillant, costumes tape-à-l’œil caractéristiques des films d’aventure d’Hollywood en cette période, lumières chaudes des scènes d’intérieur. Les bas verts d’Errol Flynn en Robin ! La cape vermillon de Basil Rathbone en Gisbourne ! Le satiné des robes de Havilland en Lady Maryan !

Claude Rains en prince Jean est mielleux et machiavélique à souhait. Basil Rathbone est d’une méchanceté noire, transpire la hargne et la jalousie à toutes les scènes. Una O’Connor qui joue Bess, la servante-duègne de Lady Maryan, geint, pleurniche à la limite du supportable, mais c’est tellement bien fait. Olivia de Havilland, 21 ans, a les yeux brillants pendant une heure quarante, amante éplorée qui n’attend que la délivrance. Et l’insolence d’Errol Flynn, charismatique, cabotin, virevoltant ! il bondit partout. La diction des acteurs de la version originale comme des doubleurs de la version française, datée mais parfaite, est un plaisir de fin gourmet.

La scène de duel finale entre Robin et Gisbourne, ponctuée des trompettes haletantes de la musique de Korngold et de gros plans sur les visages luisants de sueur des acteurs, est l’apothéose échevelée (et attendue) de la lutte du bien contre le mal qui traverse le film. Qui pour autant reste léger et délicieux.