Le musée gallo-romain de Lyon

Un autre musée, une autre architecture.

Situé sur la colline de Fourvière, en grande partie enterré près des théâtres antiques, se trouve le musée de la civilisation gallo-romaine de Lyon. Le prétexte de notre visite d’il y a quelques semaines était une exposition temporaire consacrée à l’architecte du musée Bernard Zehrfuss (1911-1996), pour les 40 ans de l’ouverture du musée.

Les collections principales m’ont agréablement surpris. Les pièces exposées sont variées : vaisselle, bijoux, statues, morceaux d’habitations ou de monuments, mosaïques. Les mosaïques sont magnifiques ; l’ensemble est bien conservé et bien présenté. Un collègue m’avait parlé de la relative pauvreté des collections, je ne suis vraiment pas d’accord. Il y en a pour tous les goûts et en quantité raisonnable. Petite blague récurrente (involontaire), sympathique : sur les cartels, la provenance des objets dans Lyon est systématiquement indiquée. Litanie de noms de rues qui rappelle qu’un chantier au centre de Lyon a de fortes chances d’être ralenti par des fouilles archéologiques.

L’exposition temporaire est intéressante, très bien illustrée. Sont présentés beaucoup de photos de constructions en chantier, quelques maquettes, des plans, des vidéos d’archive… c’est une jolie petite rétrospective pour un architecte qui a dû être célèbre dans ses années de création (1945-1975) mais qui est moins connu aujourd’hui que d’autres grands noms. Pourtant, avec l’aide de brillants ingénieurs, il a signé des ouvrages importants dont le présent musée : le siège de Sandoz, maintenant Novartis, à Rueil-Malmaison (avec Jean Prouvé pour la conception du mur rideau), le CNIT à la Défense (avec Nicolas Esquillan pour l’éblouissante conception de la structure), le siège de l’UNESCO à Paris (avec Pier Luigi Nervi et Jean Prouvé à nouveau)… 

La pièce maîtresse de la visite est bien le bâtiment lui-même. Intégré à la colline, l’ouvrage ne dénature pas le cadre des ruines des théâtres antiques. Quand on se trouve dans le grand théâtre, on voit peu du musée. Une forme longiligne en haut de la colline, deux grandes fenêtres en guise de puits de lumière, et c’est tout. L’intérieur vaste, mi-caverne mi-cathédrale, est libéré par de puissants arcs-boutants qu’on voit une fois entré. Ils sont tous différents, supportent les niveaux successifs du musée et la poussée de la colline sur laquelle le bâtiment s’appuie. Bernard Zehrfuss s’est inspiré du musée Guggenheim de New York de Frank Lloyd Wright : il n’y a pas réellement de niveaux, c’est une unique large rampe qui dessert l’intérieur. Partant de l’entrée, au sommet de la colline, elle se déroule jusqu’à son pied, tagliatelle déployée en hélice aplatie. Une fois en bas, soit on remonte la rampe et on repasse devant les œuvres qu’on a préférées, soit on prend l’ascenseur. L’ensemble est sobre, élégant, en même temps que les lignes de forces de la structure sont mises en valeur pour le plaisir visuel du visiteur. Quelques éléments notables qui ponctuent le musée participent à sa beauté architecturale : l’escalier en forme de marguerite à l’entrée, le garde-corps le long de la rampe de descente, les plafonds alvéolés.

Bernard Zehrfuss, après l’achèvement du musée en 1975, n’a plus fait d’ouvrage marquant. Il a concouru pour le musée de la préhistoire des Eyzies en 1986, a proposé un principe très similaire au musée de Lyon, n’a pas été retenu. Sic transit gloria architecti.