Dernières nouvelles du caribou

Elles ne sont pas bonnes.

J'apprends dans Libé que le caribou va mal. Il se meurt d'un excès de caribou. Ou, pour préciser, d'un défaut de pâturage dû à l'excès de caribou.

Et, c'est là ce qui m'a surpris, la faute en revient à l'homme qui n'a pas tué assez de caribous dans les années 90.

Dans la nature, c'est classique, les populations d'herbivores ont tendance à augmenter. À mesure qu'elles augmentent, les réserves de plantes se raréfient. Alors les herbivores migrent ou meurent de famine. Les herbivores partis, les plantes repoussent. Et tout recommence. Cela devient encore plus rigolo si l'on rajoute quelques niveaux à la chaîne alimentaire : des prédateurs, des superprédateurs, etc. Tout ceci se modélise très bien, à grand coup de systèmes d'équations différentielles couplées. Ce sont des systèmes oscillants - comme les réactions elles aussi oscillantes en chimie par exemple.

Alors quel est le problème ?

Les caribous meurent d'avoit été trop gourmands ? Ça devrait leur apprendre : ils vont faire maigre quelques années, une ou deux décénies au plus (dans le grand nord, la cinétique doit être prise dans la glace), le temps de laisser les plantes et les lichens prospérer. Chacun son tour, après tout. Pourquoi ces machins grisâtres n'auraient-ils pas droit à leur heure de gloire ?

Parce qu'il y a l'homme justement.

Si l'on laisse faire la nature, la population de caribou va plonger très abruptement avant de recroître lentement. Sauf que les espaces que le caribou affaibli ne paîtra plus, l'homme sera tenté de les investir. (Car l'homme remarque moins le lichen qui prospère que le caribou qui paît, bizarrement.) Et que le caribou affaibli lui-même, l'homme sera tenté de continuer de le chasser. (Car un bon gibier est un gibier en sauce, culinairement.) Et que, au final, une espèce qu'on laisse décliner est une espèce qu'on condamne.

On en est arrivé à cette situation paradoxale et pourtant inévitable où l'homme doit tuer le caribou pour sauver le caribou du caribou. Ou, plutôt, disons cela ainsi : parce qu'il ne peut pas contrôler l'homme, l'homme doit contrôler la nature pour sauver la nature de l'homme.

À titre d'exercice, le Lecteur pourra transposer les enseignements que l'on tire du caribou à la direction du Parti Socialiste Français et à ses éléphants.

Vertigineux.

Commentaires

1. Le samedi 4 juin 2005, 22:08 par Pierre

C'est super bon le caribou. A Lille ya un resto islando-finlandais top dont je ne me souviens plus du nom (Lackson-avec le o barré évidemment- qqchose comme ça) qui a du caribou fumé, miam miam.