Vie et mort des arbres nains

J'ai acquis un petit bonsaï il y a quelques années, lorsque j'ai été embauché, pour verdir mon bureau. C'est un orme de Chine, très simple, qui peut rester à l'intérieur. Il s'est retrouvé chez moi pour des questions de praticité d'arrosage.

Lorsque j'étais petit, nous avions sur le balcon un superbe érable rouge, grand, majestueux, avec des feuilles d'une grande finesse. J'adorais cet arbre. Il était beau en toute saison : de vert à rouge vif du printemps à l'été, puis roux à jaune d'or comme les vignes, en automne. Il a tenu une douzaine d'années. Nous étions orientés plein nord, ça lui convenait bien. On l'emmaillotait pour qu'il passe l'hiver et il résistait à des gelées parisiennes. Et puis un jour, plus rien, il n'avait pas subi spécialement de froid mais il n'a pas refait de bourgeons. J'ai essayé de le ramener à la vie durant l'année qui a suivi, sans succès.

Je n'ai pas spécialement la main verte, mais pour l'instant l'orme tient bien. On dit les bonsaïs sensibles aux changements d'orientation, aux déplacements ; celui-là est solide. Je l'arrose tout bêtement d'un verre d'eau du robinet de temps en temps et je ne lui mets pas d'engrais, exactement ce que je faisais avec l'érable. Quand il pleut, je le sors : les feuilles en ressortent bien vertes et grasses et la mousse à son pied revit. On voit que ça lui fait du bien. Les bonsaïs étant des arbres, ils sont toujours mieux dehors (et rares sont les espèces qui tiennent à l'intérieur). Je ne sais pas ce que cela aurait donné avec l'érable, la question ne se posait pas, mais l'orme prend le soleil, plein sud. On peut voir à l’œil nu les feuilles et les branches légères qui ont poussé dans la journée, c'est très joli.

L'entretien des bonsaïs et particulièrement leur taille est un art au Japon, qu'on apprend au fur et à mesure de nombreuses années de pratique. Plus modestement, j'en reste à des principes simples. Les bonsaïs qu'on trouve dans le commerce sont en règle générale assez résistants, pour l'arrosage comme pour la taille : vous pouvez leur faire subir le pire sans trop risquer de les endommager. De toute façon, à la repousse des feuilles vous voyez bien si votre taille est réussie ou pas... et puis vous pouvez rectifier régulièrement. En taillant de façon harmonieuse chaque groupe de branches, en éliminant celles qui sont manifestement trop longues et en évitant de couper sur les cicatrices des coupes précédentes, le résultat sera rarement décevant.

Je devrais m'en procurer un autre à nouveau. Oui, car j'ai aussi eu un serissa qui un été a fait des fleurs blanches magnifiques (à peu près comme celles-ci, mais le mien n'était pas en boule, il était plus grand et était taillé en nuages). Le pauvre serissa est mort en quelques mois après avoir attrapé une maladie des feuilles, sans que je puisse rien faire.